Pas besoin d'être spécialiste pour tomber sur un paradoxe : alors que le maquillage se veut séduisant, il cache parfois des ingrédients issus… des profondeurs. Non, ce n'est pas une légende urbaine. L'industrie cosmétique puise dans l'océan et les élevages pour formuler certains produits stars du quotidien. Gélatine de poisson dans les mascaras, ischthyocolle (issue des vessies natatoires) dans les vernis à ongles : la mer s'invite jusque dans votre trousse à maquillage. Et si les mentions INCI défilent en mode crypté sur les étiquettes, obtenir la traçabilité exacte relève du jeu de piste. Le consommateur, lui, avance à l'aveugle.
Malgré la montée du véganisme et la prolifération des labels éthiques, des composants d'origine animale ou marine persistent dans de nombreux produits. Impossible, pour le client soucieux de cohérence, de s'y retrouver d'un simple coup d'œil. L'étiquetage, souvent nébuleux, entretient le flou et complique les choix éclairés.
Plan de l'article
Poisson et autres ingrédients d'origine animale : une réalité méconnue dans le maquillage
Derrière l'apparence inoffensive d'un tube de mascara ou d'un rouge à lèvres, une réalité moins visible s'installe. Les fabricants ne s'interdisent rien ou presque, et piochent sans hésiter dans la biodiversité animale : dans la liste INCI, il n'est pas rare de croiser des références aussi limpides qu'“Pisces Extract” ou “Piscum Lecus Oil” que personne ne relie spontanément au monde marin.
Collagène marin, gélatine de poisson, mais aussi squalane extrait du foie de requin ou glycérol animal, bien d'autres substances se glissent ainsi dans les formules. La cire d'abeille, la lanoline tirée de la laine de mouton, la kératine ou certains pigments issus de cochenilles composent un inventaire bien plus large que ce qu'on imagine au premier abord.
Voici plusieurs exemples d'ingrédients issus du règne animal retrouvés dans le maquillage actuel :
- Collagène marin : propriété de raffermissement pour une peau visiblement plus tonique
- Squalane en provenance du foie de requin : apprécié pour sa texture légère et son effet hydratant
- Glycérides piscum : assouplissent et nourrissent grâce à leur fonction émolliente
L'étiquetage officiel ne facilite rien : selon la source choisie par l'industriel, une même molécule pourra provenir de la pêche ou de la culture d'olive, sans précision. Squalane, par exemple, navigue entre origine végétale et animale, et aucune mention obligatoire n'impose la transparence. Même une promesse “naturelle” ne règle rien à cette ambiguïté. Pour l'instant, seule la mention du nom INCI est requise en France et en Europe, ce qui ne permet pas au consommateur d'identifier à coup sûr la provenance. Il faut faire preuve de vigilance et d'une certaine ténacité pour y voir clair.
Quels composants d'origine animale retrouve-t-on dans les cosmétiques ?
Derrière chaque formulation, une variété d'ingrédients animaux se place sur la liste. Plus que les seuls poissons, de nombreux animaux fournissent des éléments destinés à renforcer, texturiser, hydrater ou colorer le maquillage.
Le collagène marin issu des poissons s'ajoute au chitosan trouvé dans les carapaces de crustacés pour obtenir un effet filmogène sur le mascara ou le fond de teint. La lanoline, prélevée de la laine de mouton, permet de nourrir efficacement la peau et les lèvres, tandis que la gélatine, tirée des os ou des peaux d'animaux, donne de la structure aux formules. Plus étonnant encore, l'albumen issu du blanc d'œuf, qui lisse et fige le maquillage, complète une gamme déjà large. Enfin, le terme glycerides piscum désigne des huiles de foie de poissons, qui boostent l'effet nourrissant de certains produits.
On peut facilement visualiser ces ingrédients, leur origine et leur fonction grâce à ce tableau comparatif :
| Composant | Origine | Fonction |
|---|---|---|
| Collagène marin | Poisson | Fermeté, hydratation |
| Chitosan | Crustacé | Texturisant, filmogène |
| Lanoline | Laine de mouton | Emollient, hydratant |
| Albumen | Œuf | Agent lissant |
| Gélatine | Peau ou os animal | Structure, texture |
Lait, protéines diverses, élastine… la liste s'étend selon les produits. Une chose reste certaine : sans un vrai travail de recherche sur les termes INCI, il demeure difficile de s'assurer de l'absence de tout ingrédient dont on souhaiterait se passer.
Reconnaître un produit de maquillage vraiment végan : critères et labels à connaître
Impossible de se fier à la seule liste d'ingrédients pour repérer un cosmétique sans matière animale. Les noms utilisés masquent souvent les origines, et de nombreux termes chimiques ou latins mettent les acheteurs à l'épreuve. Lorsqu'on cherche à se repérer, certains critères s'avèrent utiles pour démêler les allégations marketing et faire des choix en conscience.
Pour vérifier qu'un produit est réellement végan ou “cruelty free”, il faut se tourner vers des labels dignes de confiance. Ceux-ci garantissent une composition sans présence animale et l'absence de tests réalisés sur des animaux, à toutes les étapes de la fabrication. La mention “non testé sur les animaux” n'assure cependant pas que la formule est végétalienne ; elle signifie simplement qu'aucune expérimentation animale n'a été pratiquée sur le produit fini ou ses prototypes.
On distingue ainsi plusieurs types de labels et leur portée :
- Vegan : la formule ne contient aucune matière d'origine animale ni aucun sous-produit issu des animaux.
- Cruelty free : aucun test n'a été pratiqué sur des animaux lors de la mise au point ou de la commercialisation.
- Labels bio : certains sont compatibles avec l'éthique végane, mais ils ne garantissent pas systématiquement l'exclusion complète des ingrédients d'origine animale.
La formulation évolue. On privilégie désormais des alternatives végétales ou synthétiques : le squalane végétal remplace le squalane issu du requin, le collagène peut provenir du maïs ou du soja. Malgré la multiplication des labels, lire attentivement la composition et connaître ce que recouvrent les sigles devient une étape incontournable pour consommer en connaissance de cause.
Enfin, il ne faut pas perdre de vue que si la réglementation européenne interdit les tests sur animaux pour les produits finis, certains ingrédients importés, eux, peuvent toujours provenir de filières testant sur animaux. Les évolutions s'accélèrent ; la demande pour plus de transparence aussi. Au final, l'avenir du maquillage ne s'écrira pas seulement dans la palette des couleurs, mais à travers l'exigence de traçabilité qui s'impose désormais à l'ensemble de la filière.

